Luc Ferry : "La philosophie est très mal enseignée dans nos classes"

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La philosophie est très mal enseignée dans nos classes"



 لمّا تقلّد الفيلسوف الفرنسي " لوك فيري" Luc Ferry وزارة التربية والتعليم ، قال بالحرف :
"La philosophie est très mal enseignée dans nos classes"
12/06/2008 20:45
Luc Ferry : "La philosophie est très mal enseignée dans nos classes"
Luc Ferry, l'ancien ministre de l'éducation nationale estime qu'il faut changer radicalement les programmes. Entretien

La Croix : La philosophie demeure une matière mal aimée des lycéens. D’où vient ce malaise ?
Luc Ferry : Il y a bien sûr ici ou là des professeurs de grand talent mais, globalement, la philosophie est très mal enseignée. La preuve ? Demandez autour de vous : vingt ou trente ans après l’avoir étudiée, les gens n’ont toujours pas la moindre idée de ce que c’est… Un vague esprit critique, un art de la réflexion ?
Mais croyez-vous sérieusement qu’un mathématicien ou un journaliste ne réfléchissent pas ou manquent d’esprit critique ? Ils ne sont pas pour autant philosophes ! La vérité, c’est que la philosophie n’a à peu près aucun rapport avec ce qu’on enseigne en terminale.
   Les élèves reprochent souvent le flou des programmes et la notation aléatoire au bac. Est-ce justifié ?
   Hélas, ils ont totalement raison. Bien entendu, on vous dira partout le contraire ! Mais comme ministre, on a accès aux enquêtes non publiées et je peux vous dire que les écarts de cinq à six points sont archi-fréquents, malgré les commissions d’harmonisation des notes. J’ai pu voir de mes propres yeux la même copie notée 3 par un correcteur et 17 par un autre ! 
   Cette épreuve obligatoire au bac doit-elle être maintenue ?
Oui, si l’on change radicalement le programme, sinon il vaudrait presque mieux la supprimer…
   Faut-il s’orienter, comme beaucoup d’autre pays, vers une histoire des idées ? 
   C’est l’évidence ! Ce qui serait passionnant pour les élèves, ce n’est pas ce vague exercice «d’étonnement», de « réflexion » ou « d’esprit critique » qu’on leur demande d’avoir sur les notions au programme – l’espace, le temps, le beau, le vrai, la justice… – mais de découvrir les grandes visions du monde qui ont scandé l’histoire de la pensée.
   En fait, notre programme est un avatar de la victoire du christianisme sur la philosophie grecque. Dans l’Antiquité, la philosophie n’était pas un discours, mais un apprentissage de la sagesse, une quête de la vie bonne. Le christianisme s’est approprié le monopole de cette recherche du salut et, au Moyen Âge, la philosophie, interdite de s’occuper des questions ultimes, s’est vue réduite à une simple « scolastique », à une étude des notions.
La République naissante s’est contentée d’ajouter une pincée d’esprit critique. Au final, la philosophie est devenue dans nos classes une variante de l’instruction civique qui aurait fait hurler de rire Aristote, Spinoza, Kant ou Nietzsche. Tous cherchaient à comprendre le monde pour y trouver les voies d’une vie lucide et bonne. Si on leur avait dit que la philosophie consistait à analyser des notions en faisant semblant de s’étonner pour faire des dissertations, ils seraient tombés de leur chaise…
   En tant que ministre, n’avez-vous pas vous-même fait l’expérience de l’impossibilité de réformer cet enseignement ?
   J’ai tout essayé, mais j’étais le plus mal placé : on m’a aussitôt reproché d’être juge et partie, de vouloir imposer mes propres partis pris philosophiques ! C’était absurde, mais efficace.
  Introduire la philosophie en terminale, n’est-ce pas une erreur ? Ne peut-on pas imaginer une initiation plus précoce ?
  On pourrait commencer en seconde et ce serait une bonne chose. En revanche, je suis hostile à l’enseignement de la philosophie à l’école élémentaire. Les enfants sont trop jeunes pour ne pas être la proie d’un apprenti gourou et si l’on s’en tient à quelques discussions générales sur des «grands sujets», il vaut mieux parler d’instruction civique plutôt que de philosophie.
   Que répondez-vous à un lycéen qui vous demande ce que signifie philosopher ?
   Qu’il trouvera la plus belle des réponses dans L’Odyssée, quand Ulysse se trouve prisonnier de la sublime Calypso. Cette charmante déesse est folle amoureuse de lui, son île est un paradis et, pour le garder, elle est prête à lui offrir l’immortalité et la jeunesse éternelle ! Or, contre toute attente, Ulysse refuse. Il préfère retrouver son île, Ithaque, et ses proches. L’épisode est d’une profondeur abyssale : il signifie qu’une vie de mortel réussie est préférable à une vie d’immortel ratée. C’est ce type de sagesse laïque qu’essaieront de définir toutes les grandes philosophies.

Recueilli par Bernard GORCE
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مدرس مادة الفلسفة مُتقاعد .

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